Les Condamnés

Propulsé dans l’eau, Bernard mourut sur le champ. Ses compagnons toujours vivants, frémissaient d’horreur à voir leur confrère se faire assassiner avec autant de sang-froid. Dans les heures qui suivirent, la vingtaine de congénères restèrent dans le doute à savoir quand la leur sonnerait. C’est en de telles circonstances que l’inspecteur Morris, qui flânait par là pour des motifs purement personnels, trouva suspect d’apercevoir le corps mort de Bernard, devenu tout rouge. Ce dernier occupait très exactement l’entière superficie de l’étendue d’eau. Ce n’était absolument pas réglementaire d’abandonner ainsi une dépouille à la vue de tous. De plus, la distance entre les condamnés à mort qui l’observaient avec effroi connaissant leur dessein, était largement insuffisante. Morris considéra qu’il avait tout de même réussi sa première journée d’ouvrage en collant une amende au fautif. L’inspecteur lança alors au négligeant propriétaire, l’œil vif et menaçant : «Gare à toi, tu verras ton permis de restauration réquisitionné si tu ne respectes pas davantage les normes d’hygiène de ces pauvres homards et ce sera la chute de ton entreprise!»

21 Commentaires

  1. Wow! Concis, punché et drôle. Bravo!
    France

  2. Merci merci ! Votre commentaire est aussi concis et punché ! J’ai bien hâte de voir les textes des nouveaux participants. Les premiers textes ont monté la barre dans la qualité d’écriture et nous poussent à tenter de renouveler dans un autre genre.

  3. Ce texte est d’une efficacité spectaculaire. Il est drôle, rythmé et punché. Pour te donner quelques commentaires…
    Dans la première phrase, il me semble que le mot « chuta » n’est pas le meilleur terme dans ce contexte et qu’un autre terme aurait plus d’effet…
    Ensuite, comme ton texte a beaucoup de « punch », il me semble que ce petit bijou mériterait un titre plus punché…
    Espérant contribuer à ta réflexion…

  4. Finalement j’ai peut-être un peu trop insisté sur ma chute que je voulais comme une « inside » face à la commande. J’aimais bien qu’il commence comme il finisse même si c’était en fait un peu par hasard. Je vais penser à cela, notamment comment le retitrer sans vendre le punch. Merci du commentaire constructif et du qualificatif de bijou. Vraiment… ça m’encourage.

  5. Bonjour Julie,
    Super concision!
    Le seul détail sur lequel j’ai tiqué, dans ta première phrase:«Aussitôt qu’il chuta dans l’eau, Bernard mourut sur le champ.» Le «sur le champ» n’est pas nécessaire car tu commences ta nouvelle par «aussitôt», ça alourdit la phrase sans ajouter à l’effet de choc.

  6. Bon point. J’essaierai de trouver une uatre formulation avec cette fameuse chute. Merci pour les commentaires.

  7. J’ai hâte de voir si ça passe… ;o) On s’amuse.

    1. Définitivement, ton nouveau titre met du piquant avec cette allusion masquée à la conclusion. Par contre, le fait que les temps de verbes ne s’accordent pas m’accroche à chaque fois que je relis le titre. Libre à toi d’y penser…

  8. Je le disais je ne voulais que faire un clin d’oeil pour m’amuser, j’ai voulu faire une bon jeu de mots douteux comme je sais que ton frère Sylvain aime tant ;o) (celui dont on attend le texte impatiemment) Mais Je suis parfaitement d’accord, c’est vrai que ça ne sonne pas tellement bien, c’est même un peu grotesque. J’en essaie un autre en attendant mais peut-être pas encore le bon. Je vais continuer d’y penser. Il me reste 2 semaines pour sortir l’idée de génie!!!

  9. Pour le suivi, j’ai changé le titre de « La Chute » pour « Qui a cru que c’est assez » à « tuer dans les règles de lart ». J’avais aussi pensé plus simplement à « Les condamnés ». je devrais ouvrir un concours sur Facebook et offrir un prix à celui qui me trouverait un meilleur titre. Et le début est-ce que ça fonctionne mieux selon vous?

  10. Allo Julie :)
    Pour ma part, si je peux me permettre, « Les condamnés » aurait ma préférence :) Et pour ce qui est des changements apportés, je suis désolée de te dire, même si je trouve ton texte encore très bon, que je pense que je préférais l’ancienne version (mais je compare avec un souvenir… ce qui est hasardeux). Chose certaine, je trouve que le fait de mentionner que le condamné va mourrir à cause du choc thermique de l’eau donne trop d’indice à mon avis… Mais bon, peut-être pas: ça prendrait un lecteur tout neuf! :)). Peut-être que ça sera Sylvain, que je connais aussi!!! (Eh que le monde est p’tit!)

  11. Allo Julie, je suis plutôt d’accord avec le commentaire de France. «Les condamnés» ajouteraient une ambiguïté tout à fait bienvenue! Et effectivement, c’est peut-être parce qu’on connaît le punch, mais ta phrase d’amorce, le mot immersion particulièrement fait penser à la cuisine!

  12. Merci les filles pour vos commentaires. J’acquiesce humblement à vos recommandations. J’ai simplifié mon début, je crois que c’est effectivement plus efficace ainsi.

  13. Je laisse aller ma virgulite encore une fois! Dans ta phrase : «De plus la distance entre les condamnés à mort qui l’observaient avec effroi connaissant leur dessein, était largement insuffisante.» une petite virgule serait bienvenue après «De plus», ne serait-ce qu’à cause des règles de grammaire…
    Ce dit, ta première phrase a infiniment plus d’impact écrite ainsi!

  14. Bien d’accord, voilà c’est fait, ma virgule est ajoutée. Merci encore de tes commentaires Caroline.

  15. Rallô Julie! Je fais mes derniers commentaires avant le prochain défi!!! En fait, je relis ta nouvelle et j’y trouve des petits trucs qui me dérangent. Alors voilà:
    – Quand tu dis: « Bernard en mourut sur le champ », le « en » est de trop selon moi.
    – Je ne vois pas le lien entre les étranges circonstances, le fait que Morris flânait et qu’il trouve quelque chose de suspect… Pourquoi ne pas simplement dire « L’inspecteur Morris qui flânait par là (tout à fait par hasard), trouva suspect d’apercevoir le corps mort de Bernard…  »
    – Il y a redondance entre « laisser et abonnée » (Ce n’était absolument pas réglementaire de laisser une dépouille ainsi abandonnée.) Ça pourrait juste être (Ce n’était absolument pas réglementaire d’abandonner ainsi une dépouille.)
    Voilà! Je me permet d’être tatillonneuse parce que ton texte est vraiment mon préféré! Encore bravo!

  16. Merci beacoup France pour ces commentaires que je trouve bien pertinents. C’est vrai que j’avais tourné un peu les coins ronds pour certaines phrases. J’ai écrit ça, pas mal rapidement il faut dire. J’en ai reformulé certaines suivant tes judicieux conseils. Par contre, il a fallu que je garde le mot « circonstances », pour les raisons que l’on connait. Alors tu verras comment j’ai retourné ma phrase et tu me diras ce que tu en penses. J’ai apporté d’autres améliorations un peu plus loin également. C’est vraiment motivant d’avoir une « fan » qualifiée et attentionnée comme toi. Je reste ouverte à d’autres suggestions s’il y a lieu.

  17. Bravo Julie. Ton texte est bien amené… dynamique, surprenant ! On ne comprend d’abord pas trop ce qui se passe, on reste dans l’intrigue et le suspense, et on s’en trouve agréablement surpris avec la chute.

    Malgré le bon effet punch de la fin, je fais face à une imprécision « contextuelle » que j’aimerais me faire confirmer dans le texte. Moi qui a une vision plutôt cinématographique en écriture, le fait que tu ne précises pas dans la conclusion où l’action s’était passée, me laisse un peu hébété, avec certaines interrogations circonstancielles.

    Je comprends que c’est un homard qui fut mort ébouillanté, mais où ? On est peut-être dans un restaurant de fruits de mer ? dans une poissonnerie qui fait cuire des homards ? dans une épicerie grande surface ? Ça peut faire une différence à mon avis dans la vraisemblance de certains faits de l’histoire par rapport à l’inspecteur, par exemple.

    Je suggère simplement, sans obligation de changement, de préciser qui est « fautif du meurtre » à la fin en le nommant comme « restaurateur » ou « poissonnier ». On comprendra ainsi où ça s’est passé.

    Rendez-vous au prochain défi !

  18. Merci Sylvain pour la demande de précision avec ton oeil de cinéaste. Accordé, je préciserai mieux le contexte même si je me l’avais plus ou moins bien imaginé. Je vivais plutôt confortablement avec ce flou dans ma tête mais je voulais surtout dévoiler le punch le plus tard possible. Alors je l’ai ajouté à la dernière phrase en disant ton « permis de restauration ». Tu vois comme je suis docile et j’écoute tes bons conseils. :o))

    Bon tu m’encourages à valider certains faits part ailleurs pour voir si tout se tient. Pour l’inspecteur alimentaire, je crois qu’il allait manger au resto avec sa femme et en allant à la toilette, il a flâné devant la cuisine par curiosité et déformation professionnelle. Je suis sûre qu’ils font tous cela, c’est plus fort qu’eux. La cuisine est plutôt du genre ouverte et visible du corridor. Les homards vivants étaient plutôt dans un bassin trop petit pour le nombre et le chaudron vraiment trop petit aussi pour le gros homard flottant. C’est peut-être un petit restaurant après tout, situé par exemple sur le bord de la plage en Californie ou encore mieux à Hawaï. J’ai presque le goût de tourner le film maintenant que tu m’as obligée à mieux le visualiser. Par contre, mon effet de surprise ne pourrait pas fonctionner si on voyait tout le contexte depuis le début. C’est la beauté de l’écrit, on peut garder certains secrets pour un bon bout de temps du moins. Merci encore pour tes commentaires!

    On a hâte de voir le prochain défi!!

  19. Oups « par ailleurs ». Hé que je ne peux pas m’empêcher de m’auto-corriger, je devrais plutôt me relire 2 fois avant de peser sur le piton.

  20. A reblogué ceci sur julieguenetteet a ajouté:

    Pour le défi de septembre, je vous propose l’exercice du parcours obligé dans un texte qui se termine par une chute, c’est-à-dire un effet de surprise à la fin du récit. Pour l’occasion, j’ai choisi un mot dans la première phrase de chacun des quinze premiers chapitres du livre Le Tour du monde en 80 jours de Jules Vernes.

    Voici la suite de 15 mots à utiliser dans cet ordre dans votre texte:
    mourut – vivants – heures – vingtaine – doute – circonstances – inspecteur – flânait – exactement – superficie – réglementaire – distance – dessein – réussi – gare